Le bâtiment fait la semaine de 50 heures

À Brest, les tours du quartier de Quéliverzan en construction dans les années 50. Ce sont les premiers immeubles de grande hauteur de la ville.
Source de la photo, Archives municipales de Brest.

Aujourd’hui le quartier.
Source de la photo. Perhirin.

Les années 50 dans le Finistère (d’après un article de Ouest France)

En 1954, Jean Dréo passe le concours de l’École des travaux publics de Toulouse. « Coup de pot formidable » il est reçu. Né en 1924, ce Brestois s’était engagé à la Libération dans le Marine nationale. Mais des ennuis de santé l’ont forcé à changer de voie. En sortant de l’École des travaux publics, il n’a que l’embarras du choix. « On était garanti de trouver du boulot.» En France ou à l’étranger. Jean Dréo a même une proposition pour partir en Égypte participer aux travaux préparatoires du barrage d’Assouan. II préfère retourner dans le Finistère. « II y avait énormément de besoins en raison de la reconstruction de Brest. » 


Aujourd’hui le quartier.
Source de la photo. Perhirin.


La ville est un vaste chantier. Depuis la fin de la guerre, le secteur du bâtiment prospère. Un nombre important d’entreprises  s’est créé pour satisfaire la demande. En 1955, Jean Dréo est embauché comme conducteur de travaux par l’entreprise Le Gall. Elle compte 150 salariés venus de tout le département. Elle a déjà à son actif de nombreux chantiers, dont celui du phare de l’île de Sein. Elle attaque la construction des H L M de Kérangoff à Brest. « C’était des Lopofa, des logements populaires familiaux, se souvient Jean Dréo. On en a fait les deux tiers. J’avais la direction complète de l’opération. Le chantier a duré deux ans. Il occupait 40 gars en permanence. » 

Deux tours de Quéliverzan

Aujourd’hui le quartier.
Source de la photo. Perhirin.

Le procédé choisi pour construire ces bâtiments de quatre étages innove. « Nous avons été parmi les premiers dans le Finistère à recourir aux poutres en béton précontraint pour réaliser les planchers. Le procédé a été imposé par l’architecte. Il permettait de gagner du temps sur l’étaiement et le ferraillage. D’où un net avantage en prix de revient. » Le travail ne manque pas. Ce qui n’empêche pas les entreprises de rivaliser pour emporter les marchés. Elles investissent dans le matériel pour abaisser leurs coûts de revient. Encore peu nombreuses au début de la décennie, les grues à tour se multiplient. L’époque ne connaît pas les trente – cinq heures. « L’horaire de travail hebdomadaire était en théorie de 48 heures pour les ouvriers. En réalité, ils en faisaient 52 ou 53. Et nous, les cadres, on montait à 60 heures par semaine. » Jean Dréo se souvient d’une visite de Maurice Piquemal, « le grand, ponte de la reconstruction », sur le chantier de Kérangoff. « Il n’était pas méchant, mais il piquait de sacrées engueulades ! C’était la terreur des fonctionnaires de l’Équipement. » C’est qu’il y a des délais à tenir. Les demandes de relogement sont nombreuses. En 1958, le secteur du bâtiment emploie 8 000 personnes à Brest. La reconstruction touche alors à sa fin, ce qui entraîne un ralentissement de l’activité. « La concurrence est devenue rude », note Jean Dréo. Il reste quand même de l’ouvrage ailleurs dans le département. Ainsi, dans les années 1960, Jean Dréo travaille sur le chantier du lycée de Douarnenez, puis sur celui de la ZUP de Kermoysan, à Quimper.

Une fois achevée la reconstruction de Brest a parfois été critiquée. On a parlé d’une ville en béton ». L’erreur, répond Jean Dréo. « La plupart des immeubles ont été construits en maçonnerie tout ce qu’il y a de classique. » Lui, ce qu’il préfère retenir de cette époque, c’est une ambiance. « C’était un travail super-épanouissant, très valorisant. On avait l’impression de faire quelque chose de constructif. »

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