AVIS D E RECHERCHE

Qu’est devenue l’adolescente qu’il a sauvée à Brest en 1986 ?

Il y a trente-six ans ce samedi, Joël Lagadec sauvait du suicide une adolescente de quinze ans, sous le pont de Recouvrance. Il voudrait savoir si elle est encore en vie, ce qu’elle est devenue. Il confie aussi avoir souffert de cet épisode.

Joël Lagadec aimerait savoir si l’adolescente qu’il a sauvée du suicide le 22 janvier 1986 est encore en vie et ce qu’elle est devenue. Il l’a vue sauter de sous le pont de Recouvrance, depuis le bâtiment jaune, à droite de la photo. (Photo Le Télégramme/David Cormier)

Il fait froid sur Brest, ce 22 janvier 1986, il y a 36 ans ce samedi. Un mélange de pluie et de neige tombe sur la Penfeld, dans le courant de l’après-midi. « Soudain, j’aperçois depuis l’une des fenêtres de mon bureau une silhouette qui se tient debout et immobile sous le tablier du pont de Recouvrance », se rappelle Joël Lagadec, alors technicien en préparation du travail à la DCAN de Brest, au premier étage d’un bâtiment de la rive droite. « Je la vois se lancer à la verticale dans la Penfeld. J’avertis immédiatement les marins pompiers. Je dévale les escaliers de l’immeuble. Arrivé en bas, j’aperçois qu’une tête surnage au milieu de la Penfeld et je rejoins le pont flottant Gueydon qui la traverse sous le pont de Recouvrance ».

Il plonge dans l’eau à 8 °C

Joël hésite alors. « Si en tant qu’ex-nageur du Club nautique brestois, aller chercher quelqu’un dans une eau calme à vingt mètres ne présente pas de difficulté, je suis pleinement conscient du risque important d’hydrocution auquel je m’expose en plongeant dans une eau à 8 °C, notamment après avoir fourni un effort aussi important ».

Mais cette tête surnage encore à une vingtaine de mètres, « sans d’ailleurs émettre le moindre appel au secours ». Il enlève ses chaussures et sa montre et plonge, en jean et chemise. Il est saisi mais nage sans difficulté. « Quand je saisis le corps par la taille?, je suis surpris qu’il soit aussi léger et impassible… ».

Un quidam l’aide à son tour

« Lorsque j’arrive au pont, les marins-pompiers sont déjà là. Ils agrippent le corps que je leur tends et ils l’emmènent vers leur ambulance, sans même se retourner vers moi, ni se préoccuper de mon état (j’apprendrai plus tard que ce corps frêle et léger était celui d’une adolescente de 15 ans…). Je ne m’en offusque pas sur l’instant mais lorsque je tire sur mes bras, je n’ai plus aucune force pour me sortir seul de l’eau. Je suis dans un état de sévère hypothermie et je me rends compte, a posteriori, que j‘ai eu de la chance de bénéficier de l’aide d’un quidam resté sur place après le départ des pompiers. Sans doute que le témoignage de cette personne ne serait pas superflu si elle est toujours en vie ».

C’est notre article du 23 décembre, sur l’appel à témoins de deux sœurs au sujet d’une noyade de trois personnes et le sauvetage de plusieurs autres, à Saint-Pol de Léon, en août 1958, qui a convaincu Joël Lagadec, jusque-là réticent, ne voulant pas se faire passer pour un héros, de raconter son histoire. Il aimerait savoir ce qu’est devenue l’adolescente d’alors. « Sa maman m’avait envoyé 100 francs pour me remercier. Je lui avais renvoyé mais j’ai perdu son adresse », regrette-t-il.?

Une indifférence quasi-générale

Peut-être le fait de témoigner permet-il aussi à notre Brestois d’exorciser ce moment qui l’émeut encore. « J’ai reçu les sincères félicitations de Claude Le Roy qui dirigeait le chantier réparations et m’avait déposé en fin d’après-midi à mon domicile ». Mais « ni l’entreprise ni la mairie » ne se sont inquiétées de sa situation, ni guère son entourage. Il recevra plus tard une distinction de la fondation Carnegie après qu’un policier des renseignements généraux ait signalé son geste de bravoure. « L’article du Télégramme m’a fait un bien énorme à l’époque, au regard de l’indifférence générale que j’ai reçue ». Imagine-t-on que l’auteur de pareil geste puisse en souffrir ensuite ?

« Je n’ai pas dormi après cet évènement que j’ai eu beaucoup de mal à digérer, même si je n’étais pas peu fier d’avoir évité une mort certaine à cette jeune fille. J’étais le papa d’un petit garçon prénommé Sylvain, âgé de huit mois, et je m’en voulais a posteriori d’avoir pris le risque d’en faire un orphelin. Tout comme d’avoir pris celui de faire une veuve de sa maman Nicole, avec qui je m’étais marié dix-sept mois plus tôt ».

Contact

Toute personne détenant une information sur cette personne peut envoyer un mail à la rédaction (brest@letelegramme.fr) qui fera suivre.

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