S’il était un jeu dangereux après guerre, c’était bien la récupération de poudre dans les obus que l’on trouvait dans les blockhaus de la côte. Bien sûr, il y eut des accidents mais à Kerangoff aucun enfant n’a perdu la vie de ce fait.
Les tufs tufs
Pourtant comme dans d’autres quartiers, il y avait des enfants plus hardis que d’autres et qui passaient outre les recommandations des parents. Un jour me dit Marcel J. nous nous sommes rendus avec des camarades jusqu’au blockhaus qui se trouvait derrière le café de la Maison Blanche. Il y avait là un canon et un stock d’obus considérable. Mon copain s’est mis à enlever les ogives en prenant l’obus par la douille et en tapant sur une arête en béton. Il avait une certaine expérience car il ne prenait pas les ogives de couleurs qui pouvaient être explosives. Néanmoins, courageux mais pas téméraire je me tenais toujours à l’abri. Nous partions en expédition avec des containers de masques à gaz qui nous servaient à transporter la poudre . Elle se présentait sous forme de baguettes que nous appelions des « Tufs Tufs », l’utilisation était multiple, mèches lentes pour faire décoller des fusées éclairantes, pétards, flèches lumineuses etc.
- Au sommet du premier fort
- De G. à D ;Marcel, M.Josset et Raymond en 1948
Le blockhaus explose
Une expédition route des Quatre Pompes aurait pu se terminer plus tragiquement : nous étions partis comme à notre habitude, à la recherche de poudre et nous sommes entrés dans un blockhaus situé dans un petit chemin sur la droite en montant des Quatre Pompes vers Saint Pierre Pour nous éclairer nous avions confectionné des torches avec des vieux journaux. Le blockhaus était rempli d’obus rangés dans des caisses, sans doute une réserve de l’armée allemande. Des flammèches tombaient régulièrement et systématiquement je les éteignais avec le pied, conscient du danger que cela représentait.
Nous sortons du blockhaus pour nous diriger vers les cuves à mazout ou du moins ce qui en restait, c’était un des endroits que nous fréquentions, quand soudain nous avons entendu une première explosion suivie presque aussitôt d’une deuxième. Nous n’avons pas mis longtemps à comprendre que le blockhaus venait d’exploser. Nous avons rejoint Kerangoff rapidement sans nous vanter de notre exploit.
Quelque temps plus tard nous sommes revenus sur les lieux pour voir le blockhaus complètement éventré, le dessus de la casemate s’était soulevé sous l’effet de l’explosion.